Les contentieux en matière informatique démontrent à quel point l’achat IT est singulier et requiert une attention toute particulière. Un des points les plus importants : le contenu du contrat signé et les modalités d’exécution de celui-ci.

La Cour d’appel de Paris a eu, en septembre 2022, à se prononcer sur un litige opposant la société Butagaz à la société IBM au sujet du dérapage de son projet d’intégration d’une solution de gestion de maintenance assisté par ordinateur (GMAO) . Ce projet était nécessaire à la société Butagaz pour assurer des opérations de maintenance de son parc d’équipements de stockage et de distribution de gaz auprès de ses clients.

La société Butagaz avait acquis des licences IBM soumises au contrat éditeur et avait par ailleurs conclu un contrat d’intégration avec la société Talan (anciennement EXL Group).

Que s’est-il passé ?

La société Butagaz reprochait à l’éditeur, la société IBM France de lui avoir délivré un module non conforme. Elle soutenait que ce module n’avait jamais fonctionné et n’avait donc pu être utilisé. En conséquence, la société Butagaz avait donc résilié le contrat de licence.

S’agissant plus particulièrement de l’intégrateur, la société Butagaz n’a pas assigné dans le cadre de ce contentieux. En effet, pour la société cliente, l’intégrateur n’intervenait pas pour régler le défaut de fonctionnement du module puisque seul l’éditeur (IBM) était chargée d’y apporter les correctifs.

La société Butagaz estimait que la résiliation à son initiative du contrat de licence était donc bien fondée.

Quelle responsabilité pour l’éditeur ?

La société Butagaz a ouvert de multiples tickets d’incident auprès de l’éditeur IBM qui ont été tous résolus, à l’exception de celui relatif au module litigieux.

Pour se défendre, l’éditeur IBM indique :

  • avoir correctement livré le correctif définitif au client conformément à l’article 1604 du Code civil relatif à l’obligation de délivrance conforme.
  • que le produit livré correspond à un logiciel standard commercialisé par l’intermédiaire de l’intégrateur
  • qu’il n’était pas tenue de réaliser de prestation de cadrage, d’accompagnement ou de réalisation de développements spécifiques.

Suite à la livraison du correctif définitif, le client n’a pas souhaité le mettre en œuvre et a souhaité mettre un terme définitif au projet au motif que le logiciel étant défectueux dans l’ensemble de ses composants.

En réponse, la Cour indique que :

  • l’éditeur n’était pas en charge d’une mission d’intégration,
  • l’éditeur avait bien livré tous les correctifs permettant de résoudre les bugs rencontrés par le client,
  • aucun élément technique, tel qu’un constat d’expert n’indique un défaut intrinsèque du logiciel fourni,
  • l’ouverture d’un grand nombre de tickets d’incidents concernant la solution ne peut pas permettre de déduire que l’éditeur avait fourni un logiciel non conforme.

En conclusion, la Cour indique que l’éditeur avait bien fourni un logiciel correspondant aux spécifications connues dans la mesure ou le contrat conclu ne prévoyait pas de développements particuliers.

Quelles leçons en tirer ?

Dans ce litige, éditeur comme intégrateur étaient respectivement liés au client Butagaz par un contrat. Pourtant seul l’éditeur est poursuivi et aucune défaillance de l’intégrateur n’est reprochée.

L’issue du litige aurait-elle pu être différente si l’intégrateur avait été impliqué dans la procédure ?

Surement.

En effet, se pose la délicate et pourtant si récurrente question de la part de responsabilité de l’éditeur comme de l’intégrateur lorsque la solution acquise n’est pas en mesure de répondre au besoin du client.

Car bien souvent, la complémentarité intrinsèque du couplage éditeur-intégrateur rend bien difficile la désignation d’un seul et même responsable et il est primordial d’anticiper en amont ce cas de figure.

Les raisons principales des dérives de projet prennent fréquemment racines dans une mauvaise évaluation préalable des besoins du client, ou en raison de critères de sélection en décalage avec les objectifs visés. On comprend bien à la lecture de cette jurisprudence que les spécifications déterminées entre les parties ne semblent pas correspondre aux besoins spécifiques du client et que sans doute des développements spécifiques non anticipés auraient été nécessaires.

Il ne faut pas oublier que les projets de transformation digitale sont avant tout des projets complexes qui ne sont pas à prendre à légère.

En voulant parfois minimiser les coûts, on maximise les risques !

 

Chez ITLAW Avocats, nous accompagnons depuis dix-sept ans nos clients dans leurs projets informatiques de bout en bout afin d’anticiper :

  • l’expression pleine et entière du besoin et l’évolution potentielle de celui-ci,
  • les dérapages en cours de projet pouvant survenir du fait de l’implication de tiers intervenants,
  • le partage de responsabilité entre éditeur et intégrateur.

 

Claudia Weber, avocat fondateur et Céline Dogan, avocat responsable de l’activité e-santé et du pôle PME / TPE  | ITLAW Avocats

Besoin d’aide dans l’exécution de votre projet informatique ?

ITLAW Avocats met à votre service son expérience et son expertise en la matière.

ITLAW Avocat mobilise ses talents et son expertise en matière de protection des données personnelles, de contrats, d’innovation, de projets informatiques complexes et de propriété intellectuelle   ainsi que sa connaissance de l’écosystème IT  pour vous accompagner dans la sécurisation de vos projets et votre compliance.

Nous contacter