Un contrat doit être considéré comme valablement conclu entre les parties, même en l’absence de signature d’un contrat. C’est ce que la Cour de cassation a décidé, dans un arrêt du 15 janvier 2013.

  M. X et M. Y, agissant au nom d’une société en cours de formation, ont fait appel à un prestataire en matière de conseil aux entreprises pour les aider à contester une décision de préemption émanant d’une commune, au sujet d’un site objet d’un compromis de vente. Une proposition budgétaire est envoyée par le prestataire mais aucun accord exprès n’est exprimé par la société cliente. Des prestations d’accompagnement sont tout de même réalisées et, naturellement, le prestataire adresse sa facture à la société cliente. Cette dernière la refuse et le prestataire l’assigne en paiement.

L’affaire est portée jusqu’en appel où la Cour condamne la société cliente au versement de la rémunération due au prestataire, elle forme alors un pourvoi en cassation.

La société cliente invoquait notamment le fait que :

  • l’absence d’accord des parties sur la détermination du prix qui avait été érigée en un élément essentiel du contrat faisait obstacle à la formation dudit contrat. En l’espèce, la société cliente avait subordonné l’intervention du prestataire de services à son accord préalable sur le budget proposé ;
  • la société prestataire s’était engagée à ne rien percevoir « tant qu’elle n’avait pas une solution à proposer, qui ait une chance de fonctionner », la Cour d’appel aurait donc dû rechercher l’utilité des prestations fournies avant de condamner le client au paiement des sommes dues.

Malgré ces arguments, la Cour de cassation a considéré notamment que :

  • certes il n’y avait pas eu d’accord exprès sur la proposition budgétaire du prestataire, mais il y avait eu un  « accord tacite à l’engagement d’une prestation par cette société » au bénéfice de la société cliente, car « les parties ont continué à travailler ensemble ». Des courriers électroniques ont notamment été échangés et un protocole d’intervention auprès de la commune  a été établi ;
  • « toute prestation effectuée mérite rémunération » et que le paiement de la somme réclamée était justifié par l’ensemble des prestations réalisées par le prestataire.

A cet égard, les juges ont considéré qu’aucun accord sur la rémunération n’étant intervenu entre les parties, celle-ci devait être fixée en fonction des éléments de la cause, à savoir que le prestataire:

–          a été en contact fréquent avec les clients pendant près de deux semaines,

–          a aidé à la rédaction d’un communiqué,

–          a adressé aux clients une note sur le droit de préemption,

–          a fait appel à deux sous-traitants qu’il a payés.

La Cour a toutefois rejeté la demande de dommages-intérêts formée par le prestataire qui invoquait une perte de chance de percevoir la rémunération sur résultat prévue également au contrat en raison de la rupture brutale des relations contractuelles par le client. En effet, en toute logique, la proposition budgétaire prévoyant notamment une rémunération sur résultat n’ayant pas été acceptée formellement par le client, le prestataire ne démontrait pas la perte de chance de percevoir cette rémunération.

Cet arrêt de la Cour de cassation nous fournit une application du principe juridique selon lequel en matière contractuelle, sauf exception, un contrat est légalement formé par l’échange de volontés des parties : un simple échange oral suffit donc à l’établissement d’un contrat, la signature des parties n’étant qu’une des preuves de leur consentement.

En conclusion

  • Si vous êtes prestataire :
    • votre client n’a pas signé les documents (contrats ou devis) que vous lui avez adressés mais vous avez réalisé des prestations à son bénéfice : vous pouvez tout de même les lui facturer, sous réserve de rapporter notamment la preuve de la réalisation desdites prestations et l’absence de désaccord de votre client ;
    • pensez néanmoins à recueillir la signature de votre client sur les documents pertinents afin de conserver la preuve de son accord exprès sur le montant et l’étendue des prestations.
  • Si vous êtes client :
    • Veillez à ce que le prestataire ne démarre pas les prestations avant que vous n’ayez donné votre accord exprès sur les conditions de réalisation de celles-ci ;
    • Indiquez par écrit (courrier ou email) au prestataire les points de désaccord sur le devis ou le contrat qui vous a été adressé, afin d’être en mesure de contester en cas de facturation.

 

Claudia Weber, avocat fondateur du Cabinet ITLAW Avocats, expert Contrats IT et négociations 

ITLAW Avocat mobilise ses talents et son expertise en matière de contrats pour vous accompagner dans la sécurisation de vos projets, même en l’absence de contrat signé.

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