Dans un jugement du 21 octobre 2019, le Tribunal de commerce de Paris rejette les demandes de Canal + qui sollicitait la condamnation de France Télévisions à lui verser des dommages et intérêts pour parasitisme à la suite de la mise à l’antenne de l’émission VU.

 

En juin 2016, Canal + annonçait l’arrêt de la diffusion de l’émission Le Zapping après presque 27 ans de diffusion continue. Sept mois plus tard, France Télévisions démarrait la diffusion d’une nouvelle émission dénommée Vu, ayant le même producteur que l’émission Le Zapping. Les deux émissions avaient une durée similaire de 5 à 7 minutes et consistaient en une succession de très brèves séquences choisies parmi les programmes diffusées la veille par les chaines du paysage audiovisuel français.

 

Considérant que l’émission VU reprenait les caractéristiques de son émission Le Zapping et qu’en reprenant ces caractéristiques dans sa propre émission France Télévisions s’était mise dans son sillage, Canal + a assigné France Télévisions devant le Tribunal de commerce de Paris sur le fondement du parasitisme et demandait la réparation de ses préjudices à hauteur de 40 millions d’euros pour son préjudice financier, de 1 million d’euros pour son préjudice d’image et de 1 million d’euros pour son préjudice moral.

 

Le Tribunal de commerce déboute Canal + de l’ensemble de ses demandes. Le Tribunal rappelle, tout d’abord, que selon une jurisprudence établie, le parasitisme est constitué de « l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire ». Le Tribunal retient ensuite que la circonstance que Canal + ait choisi de renoncer à la diffusion de l’émission Le Zapping n’est pas suffisante à elle seule pour exonérer France Télévisions des griefs de parasitismes et qu’il est donc nécessaire de procéder à la comparaison des deux émissions en cause.

 

Procédant à cette comparaison, le Tribunal relève que ces émissions (de type Zapping) font désormais partie d’un genre suffisamment établi et qu’il est naturel que, comme en l’espèce, des similitudes puissent être observées entre différentes émissions relevant de ce genre, en particulier la construction, l’esprit et le format. Pour parvenir à sa décision, le Tribunal semble donc considérer que les ressemblances entre les deux émissions portent sur des éléments consubstantiels à ce genre de programmes, qui sont donc de libre parcours.

 

Le Tribunal retient par ailleurs que l’émission VU comporte de nombreuses différences telles que le titre, la place du logo, le son, l’habillage, qui permettent de la différencier de l’émission Le Zapping.

 

Enfin, sur le fait que France Télévisions a fait appel au réalisateur de l’émission Le Zapping pour réaliser l’émission VU, le Tribunal considère que, dans la mesure où ce dernier était libre de tout engagement et/ou de clause de non- concurrence vis-à-vis de Canal +, France télévisions était libre de pouvoir solliciter les compétence et l’expérience professionnelles de celui-ci.

 

Au total, l’application faite par le Tribunal des principes établis en matière de protection des formats de programmes audiovisuels semble rendre difficile toute appropriation d’un format d’émission reposant sur le principe du zapping.

 

Jean-Christophe Ienné, avocat, directeur des pôles Propriété intellectuelle & industrielle, Médias & Audiovisuel et Internet

 

 

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