L’obligation de mise en ligne de certains documents, résultant notamment de l’Open Data, amène à s’interroger sur le respect de certaines libertés fondamentales. La solution trouvée dès 2015 par le législateur, s’agissant de la publication des actes individuels administratifs, y répond de manière pragmatique.

 

La dématérialisation du Journal Officiel de la République française (JORF) s’inscrit dans la mouvance d’une politique générale de transparence de la vie publique. Initiée dès 1998 par une mise en ligne gratuite, l’ordonnance 2004-164 du 20 février 2004 confère aux actes publiés sous forme électronique une valeur identique à leur publication « papier».

 

Pour autant, deux régimes s’appliquent, selon le caractère plus ou moins confidentiel de l’acte. D’une part, le décret n°2004-459 du 28 mai 2004 prévoit que les actes individuels portant sur les changements ou la francisation des noms, la naturalisation, la réintégration ou la perte de nationalité française ne peuvent faire l’objet d’une publication sous format électronique, d’autre part le décret 2004-617 du 29 juin 2004 détermine les actes ne pouvant être publiés que sous format électronique. Ainsi, les actes dont il peut être considéré qu’ils relèvent de l’identité, voire de l’intimité, des intéressés demeurent soumis à une certaine confidentialité.

 

La disparition intégrale de la version papier du JORF au 1er janvier 2016 s’est traduite par la loi organique no 2015-1712 du 22 décembre 2015 portant dématérialisation du JORF et la loi n°2015-1713 du même jour. L’adoption du texte a fait débat, notamment quant au fait de savoir comment les actes soumis à la seule diffusion sous format « papier » seraient désormais portés à la connaissance du public.  La mise en ligne de l’exhaustivité des actes administratifs, si elle est un gage de transparence pour les administrés, pose en effet la question du respect de la vie privée des personnes concernées.

 

La technique est venue au secours du législateur confronté au dilemme récurrent du fragile équilibre entre droit à l’information et respect des libertés fondamentales : au-delà du principe de publicité des actes individuels avec indexation posé par l’article L 221-10 du Code des relations entre le public et l’administration (CRPA), l’article L.221-14 du même code prévoit que « certains actes individuels, notamment relatifs à l’état et à la nationalité des personnes, doivent être publiés dans des conditions garantissant qu’ils ne font pas l’objet d’une indexation par des moteurs de recherche ». La liste de ces actes est fixée par le décret n°2015-1717 du 22 décembre 2015, codifié dans la partie réglementaire du même code.

 

Telle a été la réponse pragmatique du Législateur pour concilier les intérêts en jeu et préserver la confidentialité de certains actes face aux potentialités toujours croissantes de l’informatique.

 

Grâce à la précaution posée par cette disposition, l’identité d’une personne utilisée comme mot clé sur un moteur de recherche ne permettra plus de pointer vers les actes relevant de cette liste, pourtant accessibles à partir des sites concernés, répondant ainsi à leur obligation de publicité. Les actes « échappant » à cette dérogation continueront à être indexés par les moteurs de recherche.

 

Odile Jami-Caston, juriste experte, directrice du pôle Data Privacy & RGPD Compliance

 

 

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