Le Tribunal de commerce de Paris s’est penché sur cette question dans un jugement du 14 décembre 2022.[1] Les juges ont fait application de la théorie de l’imprévision en droit des contrats et prononcé la résolution d’un contrats devenu trop onéreux, du fait d’une hausse du prix de l’énergie.

Que dit la loi ?

L’article 1195 du Code civil, dispose que :

« Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.

En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demandent d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe. »

Que s’est-il passé ?

  • Une filiale française d’un fabricant de carreaux de céramique espagnol est le fournisseur d’un groupe immobilier.
  • Le fournisseur et le client signent un contrat cadre de référencement du 9 septembre 2020 jusqu’au 31 décembre 2022.
  • La crise du Covid-19 ainsi que la guerre en Ukraine ont conduit à une augmentation importante des coûts de l’énergie, des matières premières et des transports. Le fournisseur souhaite donc renégocier les prix convenus dans le contrat cadre précité.
  • Les parties n’ont pas réussi à trouver un terrain d’entente lors d’une renégociation. Le fournisseur décide donc de saisir le Tribunal de commerce de Paris en invoquant la théorie de l’imprévision.

Quels sont les arguments des parties ?

  • Le fournisseur considère « qu’il y a eu un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rendant l’exécution excessivement onéreuse pour elle-même ». Il souhaite une modification des tarifs.
  • Le client conteste l’ampleur des hausses, notamment car le fournisseur n’apporte pas de preuves chiffrées pour soutenir ses arguments. De plus, il fait valoir que le fournisseur a appliqué une « surcharge énergétique » sans attendre la fin des négociations.

Quelle est la solution retenue par le Tribunal de commerce de Paris ?

  • Le Tribunal considère que les conditions de l’imprévision sont réunies, le fournisseur n’ayant pas accepté d’assumer le risque financier résultant de circonstances imprévisibles et extérieures aux parties. Le Tribunal précise qu’aucune des parties n’était en mesure de prendre en considération cette hausse exceptionnelle.
  • Les juges prononcent la résolution du contrat et refusent la demande du fournisseur de réviser les termes financiers du contrat, n’ayant pas les éléments nécessaires pour mesurer le bien-fondé des modifications du tarif.

Que faut-il retenir ?

  • Si un contrat est devenu trop onéreux du fait d’une hausse du prix de l’énergie, il est possible de demander à son co-contractant une renégociation du contrat. Si cette dernière n’aboutit pas, il est possible de demander l’intervention du juge et demander la résolution anticipée du contrat afin de se désengager.
  • Il est possible que le contrat puisse exclure ou limiter le recours à un tel mécanisme. De ce fait, il convient de vérifier ce dernier en amont.

Marine Hardy, avocat directeur des pôles Innovation & Sécurité et Jean-Baptiste Olivo, juriste stagiaire | ITLAW Avocats

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[1]Tribunal de commerce de Paris, 14 décembre 2022, n° 2022033136

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