Le 6 novembre 2014, le TGI de Paris[1] déclare l’action en contrefaçon d’Oracle abusive

Les faits :

  • en 2001 l’AFPA avait lancé un appel d’offre sur la « fourniture de progiciels de gestion comptable et financière et de prestations associées d’intégration, formation et maintenance ». La société SOPRA Group, partenaire et distributeur des produits Oracle, avait remporté cet appel d’offre puis s’était retirée en 2005, laissant Oracle reprendre l’intégralité des contrats.
  •  En 2009, l’AFPA a lancé un nouvel appel d’offre sur le développement de la « solution achat ». Apprenant cet appel d’offre, Oracle qui avait commencé un audit sur l’usage de ses licences par l’AFPA, a décidé de cesser cet audit et de soumettre sa candidature à l’appel d’offre.

N’ayant pas été sélectionné, Oracle a alors repris son audit de licence et a conclu à une utilisation non autorisée de 885 licences du logiciel Purchasing.

Des négociations se sont alors engagées entre l’AFPA et ORACLE mais celles-ci restant infructueuses, Oracle a assigné l’AFPA et la société SOPRA Group en contrefaçon pour l’utilisation non autorisée de son logiciel Purchasing et n’a pas hésité à demander une somme de 13,5 millions d’euros au titre de dommages et intérêts.

Le TGI de Paris va rejeter les demandes d’Oracle :

  • d’abord en requalifiant le litige puisque « le créancier d’une obligation contractuelle ne peut se prévaloir contre le débiteur de cette obligation, quand bien même il y aurait intérêt, des règles de la responsabilité délictuelle », comme l’avait déjà rappelé la Cour de cassation en 2012[2]. Dès lors, le TGI considère qu’Oracle ne pouvait pas invoquer un délit contrefaçon à l’encontre de l’AFPA et de SOPRA Group mais seulement une faute contractuelle.
  • ensuite le TGI relève qu’Oracle entretenait « un doute et une confusion sur ce qu’est réellement [le logiciel Purchasing] »  en particulier en prétendant qu’il n’entrait pas dans la suite Financials alors qu’il était inclus dans les CD fournis par Oracle et qu’ainsi l’AFPA n’avait commis aucune faute contractuelle car ce logiciel avait été livré par Oracle.
  • Pour finir le TGI constate que « l’usage de la pratique de l’audit précédant les appels d’offres démontre que [Oracle] fait pression sur son interlocuteur pour obtenir de nouveaux contrats et à défaut use de l’action en justice pour obtenir paiement de sommes importantes (en l’espèce plus de 13 millions d’euros) en dédommagement de « l’exclusion » de l’appel d’offre ».

Cette jurisprudence va dans le sens des multiples critiques adressées aux éditeurs de logiciels et offrira sans doute aux licenciés plus de poids dans leurs négociations suite aux audits de licence lancés par les éditeurs.

Nous pouvons également espérer que les éditeurs prendront acte de cette décision et reviendront sur leurs méthodes d’audit souvent jugées « agressives »….

Oracle a fait appel de cette décision, affaire à suivre donc…

Claudia Weber, avocat fondateur du Cabinet ITLAW Avocats, expert Contrats IT , négociations  et licensing

ITLAW Avocats mobilise ses talents et son expertise en matière de contrats, d’innovation, de projets informatiques complexes et de propriété intellectuelle   ainsi que sa connaissance de l’écosystème IT et son expertise en matière de négociation pour vous accompagner dans la réponse à un audit de licence et aussi pour réaliser un audit préventif.

 


[1] TGI Paris, 3ème ch., 1ère section, jugement du 6 novembre 2014, consultable sur Legalis

[2] C.Cass. ch. Com. 14 février 2012, n°11-10346

Nous contacter