Dans sa décision du 1er mars dernier (CJUE, 1 mars 2012, aff. C-604-10, Football Dataco e.a. / Yahoo ! UK Ltd e.a) rendue à propos de calendriers de rencontres de football, la CJUE  a confirmé l’absence de protection par le droit d’auteur des calendriers sportifs.

Cette décision est l’occasion de revenir sur les conditions de la protection des bases de données par le droit d’auteur.

 

  • A l’origine de la décision :

–       Un litige opposant la société britannique Football Dataco chargée de protéger les droits acquis sur les matchs des ligues anglaises et écossaises de football, et les organisateurs de ces ligues à Yahoo UK, Stan James (bookmaker) et Enetpulse (fournisseur d’informations sur les rencontres sportives) ; les premiers accusant les seconds de porter atteinte à leurs droits de propriété intellectuelle sur les calendriers des rencontres de football par leur utilisation sans versement de contrepartie financière.

–       La décision de la Cour d’Appel d’Angleterre et du Pays de Galles, de soumettre à la CJUE des questions préjudicielles afin de savoir si :

  • les efforts intellectuels et le savoir-faire consacrés à la création de données sont exclus du champ d’application de la directive sur la protection juridique des bases de données (96/9/CE)
  • le « choix ou la disposition » des matières au sens de l’article 3 de ladite Directive implique un ajout significatif à la donnée préexistante,
  • la notion de « création intellectuelle propre à l’auteur » requiert davantage qu’un travail et un savoir-faire significatifs de la part de l’auteur,
  • une législation nationale prévoyant d’autres conditions pour accorder une protection des droits d’auteur est conforme à la directive.
  • Rappel du régime juridique des bases de données

Les bases de données, telles que ces calendriers de rencontres sportives, peuvent faire l’objet d’une protection :

–          Par le droit « sui generis » visant à assurer la protection d’un investissement substantiel (financier, en ressources humaines, efforts et énergie) dans l’obtention, la vérification ou la présentation du contenu d’une base de données.

–          Par le droit d’auteur pour la création intellectuelle que constitue le choix ou la disposition des matières (protection du « contenant »).

  • Les précisions apportées par la CJUE

La CJUE affirme tout d’abord que l’objet de la protection par le droit d’auteur accordée par la directive ne porte pas sur le contenu de la base de données mais sur  la « structure » de celle-ci, le choix opéré entre les données et l’agencement des données.

La protection ne s’étend pas aux données elles-mêmes, ainsi les efforts intellectuels et le savoir-faire consacrés à leur création, même lorsque le choix ou la disposition de ces données constitue un ajout significatif, ne doivent pas être pris en compte dans la détermination de l’éligibilité de la base de données à la protection par le droit d’auteur.

La Cour ajoute ensuite que la notion de « création intellectuelle propre à l’auteur » implique un critère d’originalité et que le travail et le savoir-faire significatif dans la constitution de la base de données sont insuffisants pour justifier une protection par le droit d’auteur « s’ils n’expriment aucune originalité dans le choix ou la disposition des données que celle-ci contient ».

La CJUE a donc saisi ici l’occasion de rappeler l’importance de la condition d’originalité, indispensable en matière de droit d’auteur, en affirmant qu’ « une base de données […], est protégée par le droit d’auteur  […] à condition que le choix ou la disposition des données qu’elle contient constitue une expression originale de la liberté créatrice de son auteur […] ».

Ainsi, selon la CJUE, il n’y a pas d’originalité  « lorsque la constitution de la base de données est dictée par des considérations techniques, des règles ou des contraintes qui ne laissent pas de place pour une liberté créative ».

La question de l’exploitation des calendriers sportifs par les bookmakers et des revendications des organisations sportives semble être tranchée, mais attendons de lire la décision qui sera rendue par la cour britannique.

En attendant, ne retenez qu’une chose, en matière de protection des bases de données par le droit d’auteur, seule la liberté laissée à la créativité compte !

 

Claudia Weber, Avocat fondatrice du Cabinet ITLAWAvocats  et Viola Morel, élève avocat.

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