Depuis 1985, une partie du prix payé pour l’achat de supports vierges finance la redevance pour copie privée : une taxe forfaitaire incluse dans le prix des supports de stockage, censée compenser les potentielles pertes occasionnées par cette copie d’œuvres culturelles. Cette somme doit être reversée par les fabricants à « Copie France », qui rémunère ensuite les ayants-droit.

Les barèmes de cette taxe relatifs aux cartes mémoires non dédiées et aux téléphones mobiles multimédia sont annulés par le Conseil d’Etat le 17 décembre 2010 (ils prenaient en compte la copie illicite). Pour pallier à cela, la Commission copie privée adopte une nouvelle décision en 2008, à son tour invalidée par le Conseil d’Etat en juin 2011 (car elle soumet à redevance le matériel utilisé par des professionnels, chose interdite par le droit européen).

Copie France réclame néanmoins à Nokia le paiement d’une facture relative à la redevance due pour 2008. Le constructeur d’origine finlandaise – tout comme Acer, Motorola et Sony –  conteste cette redevance fondée sur un acte annulé et ainsi privée de tout fondement juridique. Le litige avec Copie France est donc porté devant le TGI de Paris.

Dans un jugement rendu le 15 mai 2012, le tribunal fait droit à la demande reconventionnelle de Copie France en s’appuyant sur les articles 545 du Code Civil et L. 311-1 du Code de la propriété intellectuelle. Ce dernier article prévoit une rémunération pour les ayants droit pour compenser les pertes occasionnées par l’exception de copie privée. Ceci étant instauré par la Loi, le juge a estimé que Copie France devait être indemnisée de l’absence de rémunération due à l’annulation des décisions et ordonne le versement d’une réparation équivalente au montant de cette redevance, soit 4 millions d’euros. Le juge va néanmoins regretter qu’aucune de ces sociétés « ne propose aucune autre grille de calcul et ne fait aucun comparatif avec des barèmes qui pourraient être mis en œuvre dans d’autres pays ».

Un mois après, devant le même Juge, l’indemnisation de Copie France va être refusée par une ordonnance de référé. Imation, mis en cause, va invoquer l’arrêt PADAWAN de la CJUE daté du 21 octobre 2010. Cet arrêt rappelle, à l’aune de la Directive européenne, que la rémunération pour copie privée compense les pertes de revenus du fait de la copie privée uniquement dans le cadre d’une activité privée. Imation soutient donc que cet arrêt a permis d’invalider les décisions rendues par la Commission copie privée depuis 2002. Déclarant que cela dépasse ses compétences, la Vice-présidente du TGI renvoi l’affaire au fond.

 

Il ressort donc de ces affaires que les personnes concernées par le paiement de la redevance pour copie privée doivent prendre garde : les tribunaux français peuvent fixer une indemnité, alors même que la validité des décisions de la Commission copie privée sont remises en cause.

 

Il convient néanmoins de suivre avec attention ce qui ressortira de la suite de l’affaire Imation, afin de savoir si les juges du fond considèrent que la Directive s’applique directement dans ce litige et qu’ils évaluent la portée de l’arrêt Padawan en France.

 

Nous ne manquerons pas de vous tenir informés des suites de cette affaire !

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