Dans une ordonnance de référé du 12 avril 2019 [1], le TGI de Paris a rejeté la demande de suppression de la fiche Google My Business présentée par un chirurgien-dentiste. Cette décision met en perspective l’intérêt légitime des différents acteurs concernés par cette diffusion.

 

Un chirurgien-dentiste sollicitait la suppression de la fiche – défavorable – diffusée sur Google My Business le concernant, en tant que professionnel.

 

On rappellera que la cour d’appel de Paris [2] a récemment rejeté une demande de suppression d’avis publié sur une fiche Google My Business dans une décision laissant à penser que, dès lors que les avis ne dépassent pas les limites admissibles de la liberté d’expression, elles doivent être maintenues.

 

La demande portée devant le TGI de Paris se fondait sur le fait que la fiche Google My Business contrevenait à la règlementation applicable à la protection des données à caractère personnel dont la nature n’était pas contestée, même si le juge relevait que les différents éléments de la fiche, « ne relèvent pas pour autant de la sphère privée ».

 

La question de la base juridique d’un tel traitement faisait débat et, plus spécifiquement, celle liée à l’intérêt légitime du responsable de traitement, lequel ne doit « pas méconnaître l’intérêt ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée ».

 

Introduit par la directive 95/46 du 24 octobre 1995, l’intérêt légitime du responsable de traitement comme base légale est repris par le RGPD en ses articles 6 et considérant 47, lequel prévoit que « Les intérêts légitimes d’un responsable du traitement (…), ou d’un tiers peuvent constituer une base juridique pour le traitement, à moins que les intérêts ou les libertés et droits fondamentaux de la personne concernée ne prévalent, compte tenu des attentes raisonnables des personnes concernées fondées sur leur relation avec le responsable du traitement ».

 

Ainsi, la mise en œuvre d’un traitement s’appuyant sur cette base juridique requiert une analyse des intérêts en présence.

 

Le tribunal a, en l’espèce, considéré que l’identification des professionnels concernés sur un tel forum relève d’un intérêt légitime d’information du consommateur, sous réserve de la protection des droits de la personnalité des professionnels.

 

Le juge rappelle que, si la loi Informatique et libertés prévoit, en son article 38 , un droit de s’opposer, à un traitement pour des motifs légitimes au profit de la personne concernée,  « la suppression pure et simple de la fiche de la demanderesse contreviendrait au principe de la liberté d’expression »,  alors même qu’il est loisible, pour l’intéressé, d’agir spécifiquement contre les personnes à l’origine d’avis pour faire sanctionner les abus d’exercice dans la liberté d’expression, ce que le chirurgien-dentiste n’a pas fait.

 

 

Odile Jami-Caston, juriste experte, directrice du pôle Data Privacy & RGPD Compliance & Mathieu Vincens, juriste

 

 

[1] TGI de Paris, ordonnance de référé du 12 avril 2019, Mme X. / Google France et Google LLC

[2] Quel contrôle pour les professionnels sur les avis en ligne ? Newsletter ITLAW Avocats n°43 – Avril 2019

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